Hussein sourit, beaucoup. Même quand il évoque un passé difficile et la grande solitude dans laquelle son exil l’a plongé. Hussein avait à peine 17 ans quand ses parents ont poussé leur seul fils à prendre la route de l’exil pour des raisons de sécurité. Hussein est handicapé mais il était promis à un bel avenir sportif en Irak.
Sélectionné pour les jeux paralympiques dans l’équipe irakienne, titulaire de plusieurs médailles gagnées dans des compétitions à l’étranger, Hussein ne vit que pour la natation. Hussein aurait pu rejoindre notre pays par avion pour y demander l’asile. Mais à l’aéroport de Bagdad, on n’a pas permis à ce mineur isolé de partir pour Bruxelles. Le jeune Irakien a donc été contraint de prendre la dangereuse «route des migrants» (Turquie, Grèce, Macédoine, Serbie) et ce voyage a été un vrai traumatisme. Dans le bateau gonflable où s’étaient entassés 45 migrants, il est tombé à la mer et a failli mourir. Il se souvient de son arrivée à Bruxelles en octobre 2015, de la première nuit passée devant la gare du Nord.
«J’avais été séparé de mon seul et unique ami qui m’avait accompagné dans le voyage. Plus de téléphone portable perdu dans la mer et donc aucun moyen de contacter ma famille et cet ami. Je ne connaissais pas la langue, j’étais seul, complètement perdu. Oui, ce soir-là, j’ai eu envie de rentrer à Bagdad». Mais Hussein s’est souvenu des paroles de son père qui lui avait conseillé de rejoindre la Belgique parce c’était un pays où la société civile, le monde associatif étaient puissants et solidaires. «Tu trouveras là des gens pour t’aider». Hussein s’est très vite tourné vers la Plateforme Citoyenne de soutien aux réfugiés. «J’étais acculé, je devais avancer», dit-il.
Au sein de l’association, on se souvient de ce jeune garçon timide qui fixait les yeux au sol en disant «je n’ai pas d’amis». Curieusement, l’Office des Étrangers a placé Hussein dans un centre d’accueil pour adultes alors qu’il était mineur. Il n’a donc pas pu bénéficier de la scolarité à laquelle il avait droit mais, dans le centre Fedasil de Florennes, on a compris qu’Hussein était un sportif de haut niveau et on l’a confié au club de natation de Charleroi. Hussein nous montre fièrement sa carte de membre. Et puis, comme si c’était moins important pour lui, son titre de séjour car le jeune Irakien a obtenu le droit d’asile.
Aujourd’hui, Hussein suit des cours de promotion sociale à l’ULB. Il apprend le français avec une enseignante de la plate-forme de soutien et poursuit ses entraînements à Molenbeek où il réside désormais. Il espère devenir formateur ADEPS en septembre prochain. Hussein sourit. Il s’est senti perdu à son arrivée en Belgique. Aujourd’hui, dit-il, il a tout ce dont il a besoin : «la reconnaissance et le soutien des autres». Son père avait raison. Hussein a reçu l’indispensable coup de pouce de la société civile mais comme bien d’autres réfugiés, il avait aussi en lui cette indispensable énergie et volonté de réussir.
Photographie réalisée par NGUYEN HOANG Virginie
Interview réalisé par VANDEMEULEBROUCKE Martine
Janvier 2017